DECES D’ANNA ALEKSANDROVNA KOURAKINE
Nous avons appris avec tristesse le décès d’Anna Aleksandrovna Kourakine le 10 septembre 2012 à l’hôpital de Colombes dans sa quatre-vingt-dix-neuvième année. Née le 21 juin 1914, à la veille de la Grande Guerre, elle a traversé le vingtième siècle et bien entamé le suivant après une enfance russe rendue difficile à cause du statut de « réprouvés » de son père, le Prince Alexandre Borisovitch Kourakine, maréchal de la noblesse du gouvernement d’Orel et de sa mère, la Princesse Sofia Sergeevna née Olive (famille d’origine bretonne avant la Révolution française), dame d’honneur de l’Impératrice Maria Fedorovna. Son père se trouvant en relégation à Viatka, la famille y vécut jusqu’en 1935, date à laquelle sa grand-mère paternelle, en exil à Nice, réussit à « acheter » ses enfants au gouvernement soviétique contre des devises. A Viatka, la jeune Anna apprit les rudiments du métier de bibliothécaire et c’est à Nice qu’elle fit ses premières armes de monitrice de camp de vacances dans l’organisation des Vitiaz. Ces deux formations, devenues passion, déterminèrent sa vie future. Arrivée à Paris en 1944, elle se livra parallèlement à ces deux activités. Bibliothécaire de 1946 à 2002 à la Bibliothèque Slave, création d’un autre prince russe devenu jésuite, le Prince Gagarine, elle suivit cette bibliothèque et son directeur le Père Rouët de Journel, qu’elle vénérait , dans ses pérégrinations. C’est grâce à la recommandation de ce dernier qu’elle entra en 1962 à la Bibliothèque Nationale où je fis sa connaissance trois ans plus tard au Service Slave. Elle fut, en outre, de 1958 à 1991, bibliothécaire au Conservatoire Russe Rachmaninoff ainsi qu’à la Bibliothèque Tourgueniev (1959 – 1962) . Pour les Vitiaz tuberculeux, elle avait organisé de 1947 à 1963 une bibliothèque itinérante qui desservait les divers établissements où ils étaient hospitalisés.
Jusqu’à la fin de sa vie, elle resta fidèle à l’Organisation des Vitiaz dont elle fréquenta les réunions, revêtue de son uniforme. Cet attachement n’avait d’égal que celui qu’elle avait pour l’Italie où elle passait toujours ses vacances.
Passionnée par l’actualité artistique, culturelle et même politique de son temps, Anna Kourakine avait l’esprit curieux et les idées bien arrêtées sur tous les sujets et ne dédaignait pas d’entrer parfois en polémique avec ses interlocuteurs.
Marie Avril, conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale de France